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B u h e z  U r  V a l a f e n n
15 mai 2006

DES PLAYMOBILS À L'ELYSÉE

 

Connaissez-vous la playmologie ? A quel âge avez-vous commencer leur étude sociologique, comme une sorte de reflet du genre humain ? Petit - et cela signifie jusqu'à un âge suffisamment avancé pour être inavouable, j'ai, comme beaucoup d'entre nous du reste, affectionné tout particulièrement les playmobils. J'en eus près d'une centaine, dans mon laboratoire. Population précise au dernier recensement avant de les laisser livrés à leur sort : 93 habitants. Affectionné, c'est le moins que l'on puisse dire. Grand manitou, sûrement un peu démiurge en culotte courte, j'ai érigé au fil du temps un véritable Etat dans l'Etat (la maison de mes parents) sur près de la moitié du sous-sol familial.
Mes playmobils avaient tous leur nom, leur histoire. J'érigeais peu à peu des immeubles de ma propre fabrication, des buildings, des routes, des pistes d'aéroport, toutes sortes d'infrastructures. J'ai créé plusieurs dizaines d'entreprises : des banques, des compagnies d'assurance, des fabricants de véhicules (avions, voitures, tanks...) en bouteille d'eau et rouleaux de papier toilette. Il y avait aussi la bourse avec des cours variant à l'aide d'un dé à 20 faces deux à trois fois par semaine, les OPA, les nouvelles stratégies industrielles, les banque-routes, les embauches et les plans de licenciements.

Pour gérer tout ce petit monde, il fallait bien doter ce pays encore anarchique d'instances démocratiques et judiciaires : les playmobils ont eu leur Parlement. Quinze élus pour 93 habitants (si ce n'est pas de la démocratie participative, ça...). Ce même Parlement désignait lui-même son président, élu pour quelques semaines, quelques mois tout au plus.
Et, bien sûr, il y avait les problèmes à résoudre. Economiques, sociaux, politiques. Les affaires de corruption et les faits divers, registre de prédilection de mon grand frère qui, à coup de scenarii apocalyptiques, venait donner du travail à ma machine judiciaire... Chacun de ses passages influait en effet sans qu'il ne le sache forcément sur une myriade de variables qu'il fallait donc ajuster. Deux immeubles détruits ? Les sociétés que ces bâtiments hébergeaient se voyaient contraintes au licenciement économique, le PIB s'en ressentait aussitôt, leurs cours à la bourse aussi. Il fallait ensuite procéder à l'arrestation du playmobil à l'origine de ce World trade Center avant l'heure. Il était jugé, emprisonné. Pour un peu, ces désordres pouvaient même coûter la présidence du playmobil en place. Et hop, élections anticipées !
Et puis, il y avait aussi les schtroumpfs. Vingt-six habitants. Une minorité ethnique, culturelle, dominée par les playmobils. Les bas quartiers, le chômage de masse, les discriminations, c'était pour eux. Jamais un seul président n'a été schtroumpf. Je jouais la carte du soit-disant réalisme. Cynique le gosse. Et pessimiste.

Cet univers playmobilo-schtroumpfien a laissé des traces et m'a d'une manière ou d'une autre influencé. Il m'a indiscutablement apporté ce goût prononcé pour la géopolitique, la politique, la macro-économie, le journalisme. Merci papa et maman de ne pas avoir contrarié cette curieuse passion pour les playmobils qui allait jusqu'à passer des heures dans ce sous-sol, y compris en hiver, un blouson matelassé sur le dos.

Ma vision du monde, aussi, doit sûrement beaucoup à cette civilisation aujourd'hui engloutie. Le monde des playmobils et des schtroumpfs est ma ville d'Is, mon Kêr Is en breton.

Plus playmobil que schtroumpf à la sortie de mes études et pendant mes premières années de travail, force est de constater qu'aujourd'hui, je me reconnais davantage dans les schtroumpfs. J'ai expérimenté l'univers des playmobils géants, ceux en chair fraîche. Me voilà non plus démiurge, mais citoyen. J'ai voulu jouer au malin ? Me voilà à la place d'un simple playmobil ! Pris au piège. Et je ne pèse non pas 1/93 de l'humanité, mais à peine 1/7 000 000 000. Et sachant que ma cote-part ne fait que diminuer un peu plus chaque jour.

Alors, forcément, on ne voit plus les choses de la même manière. Je ne sais pas qui est le grand frère qui joue à tout casser, qui orchestre ces plans de licenciements, qui a détruit le World trade Center pour de vrai, qui maintient ces pauvres schtroumpfs dans leur situation d'inférieur. 

Alors, oui, force est de constater que je ne me reconnais plus dans ce monde que j'avais rêvé. Parce que je reproduisais, comme tout enfant, sans m'en rendre compte, la société dans laquelle je vivais.

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Commentaires
B
Evit pep lec'hienn> Evit pep liamm amañ ? Hummm... Mat e vefe, sur eo.
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I
Ben, neuze... Emañ ar boulomig playmo an dra spontusañ war al lec'hienn, d'am soñj... neketa? Ha koulskoude, setu ur mennoz. Tu e vefe marteze ober luc'hskeudennoú gant boulomigoú playmo treuzgwisket evit pep lec'hienn. Eeun ha fentus. Un doare yezh dre skeudenn ha c'hoari.
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B
Fañch> Ahhh le schtroumpfissime ! Chez moi, c'était tout à fait l'inverse. Les schtroumpfs étaient plutôt marqués à gauche ! Le schtroumpfissime était en quelque sorte le secrétaire du PC et siégeait à l'extrême gauche de mon parlement (minorité brimée, certes, mais ils avaient quand même le droit de voter et de se faire élire)... Marrant, ça. Remarque, tu es plus logique que moi : un roi communiste, on a rarement vu ça !<br /> <br /> Ingivaldur> Pelec'h az peus kavet al lec'hienn spontus-mañ ? C'hoant m'eus da gaout al luc'hskeudenn gant ar playmo breizhad !!! Ret eo din goulenn dezhañ kerkent !!! :-)))))
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I
Unan all a zo a-wechoú playmoioú war e lec'hioú:<br /> <br /> http://peskaour.free.fr/jour.htm<br /> <br /> Á íslensku er ekkert strump að strumpa heldur.
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F
très beau texte merci ! ça donne envie de v'nir te voir avec mes playmobils persos (moi y'avait une autre minorité de travailleurs laborieux et exploités par les playmobils: les légo !!) et mes schtroumphes histoire de refaire des histoires interminables de pendant les dimanches à la con où, on se fait tous un peu chier minots.<br /> <br /> J'me rappelle notamment de jeux olympiques shtroumphes organisés !!! y'avait moultes épreuves, et des figurines lucky luke ou astérix avaient même le droit de participer, à coup de dés à 6 faces : combats de boxes, saut à la perche etc...<br /> <br /> <br /> et quand il n'y avait pas les jeux pour abrutir les playmobils et les shtroumphes, y'avait toujours quelques conspirateurs révolutionnaires à s'organiser pour renverser le shtroumphissime qui avait la main mise sur le pays ... de ma chambre :)
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