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B u h e z  U r  V a l a f e n n
27 janvier 2017

Le paradis français

saint-10

Me pensé-je comme un homme-machine pour me plier à cette quête schizophrène permanente ? Stop de toute urgence, j'ai besoin de redevenir moi-même. Je ne tiendrai jamais ce rythme jusqu'à l'expiration des 42,5 ou 43 annuités de cotisations retraite que je me dois d'aligner, main sur le cœur. Cent soixante douze trimestres à valider pour atteindre l'autodestruction totale de sa personnalité, la quête de toute une vie. L'obsession. L'idée fixe. 

Cent soixante-douze ? Ça y est ? J'y suis? Hourra ! Oui, mais... si je puis me permettre... et après ? 

Après ? Eh bien, Saint-Pierre me recevra, par une belle journée au-dessus des nuages, à la caisse de retraite, Il n'aura même pas préparé de seau à champagne et me demandera d’une voix de fonctionnaire, lassé par la répétition en chaîne :

-Alors, heureux ? 

-Eh bien, c'est à dire que...

-Cent-soixante-douze trimestres validés, c'est une belle performance, cher ami ! Bienvenue au paradis des Français ! Vous avez atteint l'objectif assigné par la société de votre pays, me dira-t-il en me tendant un canapé usé jusqu’à la corde par tant de culs fatigués ainsi qu’un sale verre d’infâme piquette. Vous avez pensé comme si vous étiez quelqu'un d'autre que vous-même pendant les cent-soixante-douze trimestres exigés, moi, je dis bravo ! Vous avez de quoi être fier de vous, parce que c'est beau, cette conscience professionnelle inoxydable, croyez-moi. 

-Oui, c'est beau comme une pièce de théâtre. Ou une vaste farce, dis-je.

Bien sûr que c'est beau la résignation (le renoncement, diront certains). C'est beau la conscience professionnelle (diront d'autres). Le tout est de ne pas se perdre de vue pendant cette fugace éternité. Et c’est bien ça le problème ! Une vocation permet de ne pas se perdre de vue cent soixante douze trimestres durant mais d'autres métiers s'empresseront de vous égarer en chemin. De cela, le législateur français n'en a cure, il se moque comme de son premier cotisé du jour où il a inventé cette idée géniale de faire courir l'être humain un nombre de trimestres imposé pour avoir le droit d'être considéré comme un coureur de fond dans le regard des autres...

Calez à cent soixante et quelques trimestres et vous aurez le sentiment d'être passé à côté de votre destin d'honnête citoyen. « Dommage ! Bien tenté, il y avait de l'idée ! » Renoncer à ses rêves, se conformer aux exigences du groupe pour échouer si près de la ligne d'arrivée, c’est con, hein ? Oui, quel dommage, vous ne pouvez pas savoir comment cela va vous gâcher la fête le restant de vos jours. Vous aurez toujours à l'esprit cette sensation désagréable d'être un retraité imparfait, un mauvais Français : MERDE, J’AI LOUPE MA RETRAITE À TAUX PLEIN ! Assertion totalement exempte à l'esprit des ressortissants d'une bonne centaine de pays au monde, mais vous verrez comme cette phrase tournera dans votre crâne hexagonal, jusqu'au tombeau...

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Commentaires
A
En tout cas, belle lisibilité, bravo. Ça fait rêver. Et en plus, c'est pour la bonne cause.
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C
Un travail jusqu'en 2041 pour le chantier de la construction de mon château ? Mais non, j'aurais payé rubis sur l'ongle ! :-)
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A
J'ai eu peur.<br /> <br /> Sur le coup, j'ai compris : l'autre jour j'ai signé un CREDIT sur plusieurs années, ... pour qui le travail à réaliser court jusqu'en 2041. :-)))
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C
Ah parce que tu penses pouvoir te contenter de 172 trimestres ? Attends-toi à en cumuler 180 ! L'autre jour, j'ai signé un devis sur plusieurs années, dont le travail à réaliser court jusqu'à 2041, pour mes 71 ans ! Conclusion, je ne pourrais pas être à la retraite à cet âge. Conclusion : si je ne suis pas mort avant, je n'ai pas fini d'emmerder mon prochain et mes actuels et futurs collègues.
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