Daïk, chapitre 16 / Ran niver seizh
SEIZH – 7 -
L’ENFANT.
— Chante-moi la série du nombre sept.
LE DRUIDE.
— Sept soleils et sept lunes, sept planètes, y compris la Poule.
Sept éléments avec la farine de l'air (les atomes).
OIT. LE VENT EST L’UN DES SEPT ÉLÉMENTS.
Mais que sont ces sept soleils, ces sept lunes,
ces sept planètes y compris la poule ?
Daïk est à mille lieues d’imaginer qu’on ne puisse
percevoir de son point d’observation que sept planètes.
Ce système solaire en compte huit, Est-ce que je me trompe ?
Taliésin lui parle d’un monde révolu et si lointain où l’observation
avait pour limites l’œil humain dépourvu du bras armé de la technologie.
Ce monde était porté par un élan philosophique nouveau et puissant.
Les légendes innombrables étaient au cœur du savoir, et cette transmission
se faisait presque exclusivement par la bouche…
-Par l’œil, par la bouche ? Vous voulez dire que cette connaissance du cosmos
a débuté par l’observation primitive et que ces récits antiques ont été bâtis
par des animaux primitifs dénués de… de maîtrise de la technologie ? L’intelligence
appelle l’intelligence. Il a bien fallu un jour que des esprits éclairés commencent
le travail à une époque où il n’y avait pas encore d’ampoules !
-Difficile de ne pas penser comme un enfant sans pères, n’est-ce pas ?, souffle
Taliésin. Difficile de s’imaginer l’ampleur des transformations opérées
par les générations antérieures... Sais-tu que Merlin comme moi-même
étions des enfants sans pères ? C’est ce qu’a colporté l’Historia Brittonum.
Mais les auteurs chrétiens des légendes arthuriennes relatent une autre version
et disent que la mère de Merlin existait et qu’elle s’appelait
Adhan et que le père était un esprit du souffle ou du vent...
Enchanté, esprit du vent !
Daïk acquiesce, fait celui qui connaît une célébrité inconnue à ses yeux
que l’on présenterait dans une soirée mondaine.
Le dos tourné, il glane quelques infos de secours.
Ainsi, Taliésin serait à la fois un barde historique et un druide mythique :
son nom comme celui de Merlin étant associés aux grands récits
des Bretons du Ve et VIe siècle après le grand messie. Un messie issu
d’autres croyances : Jésus Christ !
« Hé, je connais ! »
Daïk sait que ce messie a donné naissance à une religion qui a fini par dominer, entre
autres, les croyances celtiques et qui a repris un grand nombre de ses rites et
légendes. Les druides immortels sont fort circonspects à son sujet.
Daïk songe au vieil Ann Drouiz. S’il veut comprendre cette planète et le drame
auquel il a assisté impuissant, il doit remonter aux premiers druides, quelque mille
cinq cents révolutions terrestres avant l’obsession de l’atome...
Il ne doit plus seulement entrer en communication avec Taliésin ou Merlin,
mais partir à leur rencontre. Il sait qu’ils sont dépositaires de cette légende.
Le chant des Séries s’est transmis à eux par tradition orale, et ils ont été
de ceux qui ont influencé ses nouveaux maîtres tel qu’Ann Drouiz. Ann Drouiz
qui se refuse de lui enseigner les Rannoù jusqu’au bout, tandis que Taliésin
s’esquive en le renvoyant à sa méconnaissance des anciens.
Pourquoi donc ne veulent-ils pas l’aider à grandir plus vite ?