J'ai testé pour vous : faire du land-art entre Carnac et La Trinité-sur-Mer

J'AI TESTÉ  POUR VOUS : LE LAND ART SUR L'îLE DE STUHAN

Allez, zou. Entre deux (re)découvertes du guide de la Bretagne insolite, une petite escapade en compagnie de la Vannetaise Karen Raccah, artiste incontournable du land art en Bretagne. Voilà bientôt six ans qu'elle revisite et réinterprète, galet par galet, brindille par brindille, ce que la nature brute veut bien livrer, sans contrepartie - si ce n'est celle d'en prendre soin. z 

Voilà qui va donc changer un peu de l'actualité récente, celle des marchands de mazout un peu trop pressés et trop souvent blanchis, un comble.

Démarche artistique visant à créer une œuvre in situ à partir d'éléments naturels collectés au gré de son inspiration, le land art est un art qui se pratique sur la pointe des pieds (lui). En la matière, l'artiste se doit de renoncer à sa toute puissance créatrice. " Quand on fait du land-art, on est obligatoirement amené à se poser des questions sur notre impact sur l'environnement. A veiller à ne pas piétiner telle espèce protégée, à ne pas piller les ressources naturelles", explique Karen Raccah, qui anime chaque année hors saison estivale des stages d'initiation ouverts au grand public sur la côte morbihannaise mais aussi en forêt.

Parmi ses lieux de prédilection, la magnifique plage de Men-Du, entre La Trinité-sur-Mer et Carnac, et son île de Stuhan, accessible à pied depuis le continent à marée basse via un tombolo.

Totalement préservée, l'île offre, sur un tout petit périmètre, un remarquable condensé de plantes maritimes : pourprier des plages, ail des dunes, euphorbe du littoral, silène maritime... Dans un tel cadre, à la fois puissant et sensible, s'initier au land-art ravira promeneurs et artistes amateurs, entre éveil des sens et réinvestissement de ses propres émotions : « Dans le land-art, il est important d'avoir conscience du lieu où l'on est, d'observer, de laisser jaillir une émotion. »

C'est ainsi que le stage en immersion démarre. Par un face à face. A portée de regard et de main, un champ quasi infini de possibilités. Guidé par Karen Raccah, qui s'attache à suggérer sans trop orienter, on est convié à trouver ses propres points d'appui, à apprécier un point de vue, une perspective parmi les rochers. On est séduit par un alliage inattendu de couleurs sur un galet ; notre regard est capté par un éclat de schiste ou de granit. Optons pour un jeu d'équilibre de pierres levées et laissons-nous ensuite aller à des compositions qui semblent ne tenir qu'à un fil. «  Il faut sentir la pierre. Toutes ont un point d'appui, même posées à la verticale. » Avant d 'assister à la destruction à marée montante de plusieurs heures d'assemblages improbables, on aura eu à cœur de revisiter les strates érodées des rochers en comblant les interstices parallèles de couteaux ou d'algues blanches, l'ensemble formant des lignes contemporaines très graphiques. Jusqu'où l'art va-t-il donc se nicher ?

Au terme d'un après-midi de land-art, place à la photographie. L'autre spécialité de Karen Raccah, qui a participé en avril au festival Photo de mer de Vannes et ouvert une galerie quai Franklin à Auray.