LE CHAUDRON MAGIQUE, MONCONTOUR

Pour un peu, ils y passaient leurs nuits à fabriquer du vin médiéval. Imaginez le tableau, les marchands du Chaudron Magique roulant des tonneaux cerclés, œuvrant au flambeau dans la cave de leur demeure de pierre élancée, plantée sur les hauteurs de Moncontour. Dans leur antre, tels des apothicaires, ils n'auraient pas compté leurs lunes à préparer d'invraisemblables élixirs alliant eau de rose, clous de girofle, cannelle moulue, sucre roux ou tubercule de gingembre... Non, c'était trop. Les gentilshommes et gentes dames de la place de la Carrière n'en seraient pas venus à bout de leurs hypocras et autres vins de clairet. Des marchands de Nantes étaient prêts à leur faire des ponts d'or, pourtant. Mais ripailles ou breuvages, il fallait choisir ! Sire Pascal et dame Nadine Travers ne se voyaient pas faire fi de tant d'années consacrées avec amour à l'andouillette à la ficelle et aux joues de bœuf braisées.

" On était passé de la mignonnette à la palette... "

Pis, les fidèles clients de la rue de la Carrière en auraient brandi leurs hallebardes ! Des coups à fomenter des révolutions. Alors, leurs vins du Moyen-Âge, le Chaudron Magique les réserve désormais à ses habitués ainsi qu'aux fêtes médiévales de Moncontour. " On était passé de la mignonnette à la palette et on y dépensait toute notre énergie ! ", se souvient en plaisantant Nadine Travers. Depuis quatorze ans, elle fait tourner la marmite du restaurant médiéval avec son mari Pascal, un ancien chef pour relais et châteaux - c'était prémonitoire. Dès le lancement du Chaudron, ils décident de coller corps et âme avec le cadre médiéval de la cité millénaire. L'été, le soir et en week-end, les restaurateurs sortent leur tenue d'apparat et, à l'occasion, saisissent au vol l'aimable clientèle qui se retrouve elle aussi parée de ses plus beaux atours et rebaptisée derechef.

Bannières bicolores au vent, sous un air de madrigal ou au son du luth, le Chaudron Magique sert de copieuses assiettes du mendiant, un brouet de poulet fermier de Plessala (poulet persillé et épicé sauce au vin), une tourte de ménagier aux légumes de saison, inspirée des recueils de conseils domestiques qui avaient court au XIVe siècle. L'une des spécialités maison, le pâté du chaudron, se veut lui aussi tout en générosité. " Il est bio, issu de la boucherie d'Yvon Guillemoto, trente ans de métier et un remarquable talent. C'est bien simple, avertit Nadine Travers, je lui ai formellement interdit de prendre sa retraite. " Outre les quasi-mythiques andouillettes à la ficelle de Plélan-le-Grand et les joues de bœuf braisées, le Chaudron excelle aussi dans la préparation de ses poêlées de Saint-Jacques à la Celtique. Les noix de Saint-Jacques sont bretonnes de préférence. " S'il le faut, quand il n'y a pas d'arrivage, elles proviennent d'Écosse. Mais elles ne sont sûrement pas congelées ! " C'est dit. À Moncontour, c'est sans détour : inutile de venir chercher des noix aux Saint-Jacques du Chaudron Magique.

i : Le Chaudron Magique, 1 place de la carrière, 22510 Moncontour, internet : le-chaudron-magique.com

& : Le guide de la Bretagne insolite & relax, extrait

( : Lefeuvre