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B u h e z  U r  V a l a f e n n
4 mars 2010

Natif du pays... né de la mer

 

golfe pictons vendee

 

Alors que se déroulent aujourd'hui de bien tristes cérémonies en la cathédrale de Luçon - ma ville natale - il m'est revenu en mémoire cette étonnante carte du sud-Vendée, qui représente la Baie de l'Aiguillon avant son assèchement et la construction d'immenses polders, sur 100 000 hectares, sous l'égide de Hollandais (d'où son surnom de "Ceinture des Hollandais").

Cet ancien golfe marin couvrait tout le sud du département, jusqu'aux portes de Niort même, dans les Deux-Sèvres ! Située à 15 km de la mer, Luçon était une ville côtière, comme le rappelle encore sa Place du Port, aujourd'hui en plein centre ville.

Toute cette partie du Bas-Poitou, également connue sous le nom de Marais Poitevin, est constituée de deux entités : à l'Est, le marais mouillé (ou Venise Verte) et à l'Ouest, le marais séché, comblé peu à peu par des alluvions d'origine fluviale et marine (le bri). Ce golfe marin s'appelait jadis le Golfe des Pictons, du nom de la tribu gauloise occupant alors le sud de l'actuelle Vendée.

Des traces d'occupation pré et protohistorique ont d'ailleurs été identifiées sur les anciennes rives ainsi que sur les anciennes îles, aujourd'hui juchées en plein milieu des terres : c'est le cas de La Dive. La photo en lien ici permet d'en juger de façon assez convaincante : http://www.photo-vendee.com/image/370-photo-la-dive-de-l-aiguillon

Un Golfe du Morbihan entièrement comblé

Ce site, étonnant, fait l'objet d'études scientifiques et de régulières visites scolaires. Ce fut mon cas en CM1 ou en CM2, vers 1984-85. Je me souviens de cet étonnant éperon rocheux calcaire, au beau milieu des polders... Un vestige de ce qui fut, il y a quelques millénaires, l'équivalent du Golfe du Morbihan ou du Bassin d'Arcachon, ni plus ni moins ! Les proportions sont d'ailleurs comparables. Il faut donc imaginer cette incroyable entreprise pluriséculaire, accomplie par l'homme avec la complicité de la nature, qui consista à combler des milliers et des milliers d'hectares parsemés d'îles comme Vix, l'île d'Elle, La Dive...

À partir du VIIe siècle, de grands seigneurs féodaux ont procédé à des donations de parties entières du marais au bénéfice d'abbayes alentours (les plus connues étant Maillezais, Nieul-sur-l'Autise, l'Absie, Saint-Maixent et Saint-Michel-en-l'Herm). Des travaux d'aménagement et d'assèchement sont lancés dès le Moyen-Age. Après une interruption pendant les guerres de religion, ils sont repris sous Henri IV, qui fait alors appel à des investisseurs huguenots originaires des Pays Bas. L'ingénieur flamand H. Bradley est nommé grand maître des digues. De grands aristocrates de la Cour verront très vite comment tirer profit de ces assèchements.

La vocation navigable est accentuée sous Napoléon I, qui prend un décret d'aménagement de la Sèvre niortaise, en 1808. C'est le coup d'envoi d'une colossale phase de grands travaux, sur près d'un siècle, qui voient la constitution des actuelles digues, notamment du côté de l'Aiguillon-sur-Mer et de la pointe d'Arçay (où j'allais pêcher les coquillages et les crevettes avec mon père et mon frère). Des canaux évacuateurs de crues et de grandes rigoles, comme La Garette, sont édifiés entre 1835 et 1850. D'autres travaux sont entrepris dans les années 1920, à la suite d'une série de tempêtes dévastatrices. Puis, plus rien. Le remembrement, au contraire, vient fragiliser le milieu naturel.

Mais les chenaux et les digues semblent jouer malgré tout leur rôle, si bien que l'on finit très vite par oublier les affres du passé. Le boum de l'immobilier, des années 90 et 2000, feront le reste. On connaît bien, dans la région, ces nouveaux lotissements, érigés sur des terres de marais... Les constructions ont fini par se montrer de plus en plus audacieuses... Jusqu'à venir coloniser le pied des digues.

On connaît aujourd'hui la suite.

Ironie de l'histoire, la communauté de communes de la région a été baptisée il y a quelques années : "Communauté de communes du pays né de la mer".

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Commentaires
B
Nan nan, j'suis toujours là. Par contre, je connais indirectement plusieurs inondés. Mon ancien **** et sa femme font malheureusement partie des victimes, aussi. Brrr.<br /> Bon, je ferais bien de passer à autre chose, neketa ?<br /> Please wait. Inspiration loading...
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C
Bon, t'as pas été englouti toi aussi ?
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C
Te l'expliquer, non, car je ne connais pas suffisamment et puis parce que tu as déjà donné des débuts d'explication. Une forte luminosité qui induit un fort rayonnement et une forte évapotranspiration et donc un assèchement des sols, et même si les températures ne sont pas très fortes, elles sont quand même fort honrables. Les précipitations ne sont pas très fortes non plus (de l'ordre de 700 mm/an). Enfin, le substrat est calcaire (encore lui) et est donc perméable dans l'autre sens aussi. Je ne dis pas que c'est ainsi que ça se passe, car il doit y avoir des lentilles argileuses, mais ça peut jouer. Donc, au total, pas étonnant qu'il y ait des déficits hydriques estivaux car il en faut parfois moins que ça.
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B
Et précisons également que le degré de précipitations et d'ensoleillement n'est pas le même non plus (ensoleillement sup. à 2000 h/an dans le sud de la Vendée, ce qui est supérieur à l'ensoleillement de Toulouse par exemple). A cette latitude là en Europe, je crois que c'est même l'une des régions les plus ensoleillées, avec les sommets alpins et le Caucase.
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B
Merci pour cet éclairage instructif sur les natures de sol respectives. Ce qui est assez étonnant, également, mais tu vas sûrement pouvoir m'expliquer cela, c'est que cette région souffre paradoxalement de manque d'eau l'été. Précisons tout de même qu'en amont, de vastes étendues céréalières sont exploitées avec recours massif (y compris en journée) à l'irrigation par les nappes souterraines. Sous réserve, je crois avoir lu un jour qu'ils en étaient rendus à puiser dans la 3e nappe phréatique...
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